1 Jn 2, 20-27 et le chrisma en quiconque Le prédicateur "serviteur inutile". La christité
Saint Jean ne craint pas de dire « Vous avez reçu un chrisma… et vous n'avez pas besoin que quelqu'un vous enseigne. » Le prédicateur serait-il donc un serviteur "inutile" ? et qu'est-ce que cela veut dire pour l'être-ensemble que Jean-Marie Martin appelle la christité ? Sur ce thème voici deux extraits de deux sessions différentes animées par J-M Martin : un extrait du II du chapitre III de la Nouveauté christique avec des ajouts venant d'une session sur la 1ère lettre de Jean ; un extrait du I 1° et du II 4° du chapitre IV du Sacré (liens en note)[1].
Dans chacune des deux sessions J-M Martin emploie l'expression "serviteur inutile", expression qui revient souvent dans sa bouche pour dire comment il conçoit son rôle. En préambule figure une remarque sur l'expression "serviteur inutile" qui figure dans l'évangile de Luc mais qui n'est pas toujours bien traduite.
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1 Jn 2, 20-27 et le chrisma en quiconque
Le prédicateur "serviteur inutile"
Préambule.
En Luc 17, 7-10 s'agit-il d'un serviteur "inutile" ou d'un serviteur "quelconque" ?
L'expression "serviteur inutile" se trouve dans la bouche de Jésus s'adressant à ses disciples et c'est une expression contradictoire.
«Qui d'entre vous, s'il a un esclave, laboureur ou berger, qui rentre du champ, lui dira : "Tout de suite, viens, allonge-toi" ? Non ! Mais il lui dira : "Prépare-moi à dîner. Ceins-toi, sers-moi, jusqu'à ce que j'ai mangé et bu. Et après cela, tu mangeras et boiras, toi !" Est-ce qu'il a gratitude pour l'esclave qui a fait ce qui était prescrit ? Ainsi de vous : quand vous aurez fait tout ce qui était prescrit, dites : "Serviteurs inutiles, voilà ce que nous sommes : ce que nous devions faire, nous avons fait !" » (Luc 17, 7-10, traduction sœur Jeanne d'Arc).
Le mot employé par Luc est achréioi (inutile). Mais, au lieu de la traduction "serviteurs inutiles" (la Bible Segond traduit même "esclaves inutiles"), certains traduisent "serviteurs quelconques" (TOB) ou "simples serviteurs" (Bible de Jérusalem, Bible de la liturgie).
Comme le soulignait Joseph Pierron[2] en octobre 1998 :
« Le texte du Nouveau Testament est bousculé par la lecture qui l'interroge dans un autre langage. Je vous donne un exemple : dimanche dernier, c'était le texte du serviteur inutile. Comment le missel avait-il traduit ? « Nous sommes des serviteurs quelconques. » Mais un serviteur quelconque n'est pas un serviteur inutile ! Si je veux tenir compte du texte, je dois essayer de voir qu'est-ce que c'est que "servir" et de quel ordre est cette inutilité. C'est peut-être dans cette contradiction-là qu'est la vérité de l'Évangile. En effet la vérité de l'Évangile n'est jamais dans la voie facile d'interprétation que je lui donne. »
I – 1 Jn 2, 20-27 : le chrisma
Voici la fin du chapitre 2 de la première lettre de Jean. Nous allons trouver là un mot que nous n'avons encore jamais rencontré, c'est le mot de chrisma. Et ne me demandez pas pourquoi je ne le traduis pas, parce que c'est toute la question. Ensuite nous nous demanderons comment nous approcher de ce mot. Pour commencer nous lisons dans la traduction de vos Bibles.
« 20Quant à vous, vous possédez une onction, reçue du Saint, et tous, vous savez. 21Je ne vous ai pas écrit que vous ne savez pas la vérité, mais que vous la savez, et que rien de ce qui est mensonge ne provient de la vérité. 22Qui est le menteur, sinon celui qui nie que Jésus est le Christ ? Voilà l’antichrist, celui qui nie le Père et le Fils. 23Quiconque nie le Fils n’a pas non plus le Père ; qui confesse le Fils a le Père, aussi. 24Pour vous, que le message entendu dès le commencement demeure en vous. S’il demeure en vous, le message entendu dès le commencement, vous aussi, vous demeurerez dans le Fils et dans le Père ; 25et telle est la promesse que lui-même nous a faite, la vie éternelle. 26Voilà ce que j’ai tenu à vous écrire à propos de ceux qui cherchent à vous égarer. 27Pour vous, l’onction que vous avez reçue de lui demeure en vous, et vous n’avez pas besoin qu’on vous enseigne ; mais comme son onction vous enseigne sur tout – et elle est véridique et elle ne ment pas –, puisqu’elle vous a enseignés, vous demeurez en lui. » (TOB)
1) Lecture suivie.
● Verset 20.
« 20Et vous, vous avez un chrisma – le mot chrisma est de la même racine que le mot Christos. Autrement dit, si le Christos est plein de chrisma, la consécration est faite pour être répandue sur la totalité de l'humanité. C'est pourquoi l'expression de pneuma (ce qu'on traduit par Esprit)[3] est à symbolique fluide : le pneuma se répand, il est versé, il emplit –
… un chrisma à partir du sacré – à partir de (apo) : il vous est donné par le sacré. Le sacré est un des noms du Christ. C'est ce que dit explicitement Simon-Pierre en Jn 6, 69 «nous nous avons cru et nous avons connu que tu es le consacré de Dieu ». Le chrisma vient du sacré, du Christ sans doute, et de l'Esprit Sacré sans doute.
Le Christos, Messiah en hébreu, désigne celui qui est oint, qui est oint du pneuma de Dieu. L'imprégnation, l'onction, est une symbolique très importante dans tout cet aspect des choses. Être imprégné de quelque chose est une façon de dire la proximité. Il faudrait étudier les notions d'imprégnation, les notions de mélange, de mélange total, selon la physique des stoïciens qui est très particulière. Donc ici il s'agit de cette imprégnation : « vous avez reçu l'onction du pneuma ». C'est le pneuma qui oint et qui consacre, c'est pourquoi on l'appelle Pneuma Sacré que nous traduisons par Esprit Saint. Mais “saint” n'est pas une bonne traduction, c'est le Pneuma Sacré, le Pneuma de Consécration. Donc chrismation, consécration…
Vous avez remarqué que ce qui est en question ici, c'est d'être oint de vérité (v. 21). « Il nous a donné de son pneuma »[4], cette expression qu'on trouve chez Paul, signifie qu'il nous a donné de son savoir, de son connaître, il nous a donné du contenu de son pneuma. Le savoir peut désigner l'acte de savoir et le su (ce qu'on sait).
Il nous a donné de son savoir, de son Esprit, c'est ce qu'on appelle aussi la Révélation, c'est-à-dire que nous ne recevons pas simplement de la chose, mais du savoir de Dieu sur la chose. De toute façon, nous ne savons rien qu'à partir du savoir de la langue, car c'est l'écoute qui nous donne de voir. Ceci est vrai aujourd'hui, nous voyons selon l'accommodation au sens métaphorique : le dire accommode l'œil. C'est le “Voici” : voici ce qui est à voir. C'est la donation première. Je reviens sur une chose déjà dite mais qui est loin d'être intégrée. En tout cas, le savoir dont il est question dans l'Évangile, c'est le savoir de Dieu qui nous est communiqué, qui nous ouvre donc un regard neuf par rapport au savoir à partir de quoi notre langue native nous donne de voir quelque chose.
… et vous savez tous. – Vous avez tous la connaissance. Pour les anciens nous sommes imprégnés de connaissance. Nous ne fabriquons pas des connaissances, la connaissance se reçoit.
Par parenthèse, il faudrait penser que connaître, c'est essentiellement pénétrer. En hébreu c'est très clair puisque « Adam connut Eve », c'est ce qu'on appelle "la connaissance au sens biblique". Dans ce que nous évoquons ici, l'imprégnation ou la pénétration n'est pas du tout à entendre au sens chimique ou même empirique. Au sens biblique, connaître, c'est que se rassemble ce qui se ressemble. C'est le thème de la proximité ; et la pénétration est l'extrême proximité.
Nous trouvons cela aussi chez les présocratiques pour lesquels la pensée est le rassemblement des éléments homogènes. Pour nous, au contraire, la pensée est le rapport d'un sujet et d'un objet et la différence occupe une place essentielle. Ici, nous sommes dans une pensée de la mêmeté, ou plus exactement ce que les anciens appellent isos kaï homoïos : égal et semblable. Il y a quelque chose à penser de capital pour moi. Que veut dire connaître dans tout cela ?
Le titre de Christos (v. 22) est mis ici en rapport avec la connaissance puisqu'on est enduit de connaissance. « Vous avez un chrisma » c'est-à-dire une source intérieure de connaissance dont vous avez été pénétrés.
● Versets 21-25.
« 21Je ne vous écris pas parce que (de ce que) vous ne savez pas la vérité, mais parce que (de ce que) vous la savez, – L'Écriture n'a donc pas pour tâche d'apprendre ce que l'on ne sait pas, elle est le déploiement de ce qui se sait déjà. – et que tout falsificateur (pseudos) n’est pas de la vérité.
22Qui est le falsificateur (pseustês), sinon celui qui nie que Jésus est le Christos ? – « Celui qui nie que Jésus est le Christos » : on ne sait pas très bien à qui Jean fait allusion ici. Il va parler de l'antichristos et il en a déjà parlé dans un verset précédant que nous n'avons pas lu : « Petits-enfants, c'est la dernière heure, et comme vous avez entendu qu'un antichristos vient, et maintenant de nombreux antichristoï sont venus dans le monde » (v. 18). Donc c'est de façon opportune que ce titre de Christos est mis en évidence ici. C'est un titre qui a à voir avec une gestuation sacrale, mais qui a une signification profonde intérieure, de grande importance.
Celui qui nie que Jésus est le Christos, celui-là est l'Antichristos : celui qui nie et le Père et le Fils. 23Tout homme qui nie le Fils n’a pas le Père. Celui qui confesse le Fils a aussi le Père. » Fils de Dieu et Père sont des termes de toute première importance, de tout premier rang, et la christité est un des traits du Fils.
Oindre, imprégner : quel rapport avec le Père ? Ce rapport est dans la configuration première de l'ouverture de l'Évangile, c'est la scène du Baptême du Christ qui est la célébration anticipée de la résurrection. Le Père fait reconnaissance de paternité en disant « Tu es mon fils » ; il salue l'humanité en disant cela, nous sommes compris dans la salutation qui est faite à Jésus. C'est ce que saint Paul dit au début de l'épître aux Éphésiens : « Béni soit le Dieu de notre Seigneur Jésus-Christ qui nous a bénis en pleine bénédiction (paternelle) dans les lieux célestes ». C'est la voix du Père qui vient du ciel. En effet le mot de "fils de Dieu" a, dans le monde vétéro-testamentaire, une signification collective : le peuple d'Israël est fils de Dieu. Du même coup, les premiers chrétiens entendent que, lorsque le Père salue le Fils, il nous salue dans le Fils. Le Christ est le Monogénês, le Fils un et unifiant, c'est-à-dire contenant en lui les multiples tekna que sont les enfants de Dieu, c'est-à-dire la totalité de l'humanité.
Vous avez au Baptême une ouverture, pas seulement l'ouverture des cieux à la terre, mais aussi l'ouverture de l'Évangile. C'est la célébration de tout ce qui sera contenu dans la suite. Il faudrait étudier le passage concernant le Baptême chez saint Jean[5] et même dans les Synoptiques, pour voir l'ampleur de la scénographie de ce qui est indiqué dans la scène du Baptême[6].
Qui a le Père a le fils, et qui a le Fils a le Père : pourquoi ? Il n'y a pas de fils sans père, bien sûr, mais il n'y a pas non plus de père sans fils. En effet le père ne s'appelle pas père s'il n'y a pas de fils. Autrement dit, le titre de Père n'est donné à Dieu que par la reconnaissance du Fils, son Fils qui est Jésus, Christos. Là nous sommes dans la première articulation intérieure des titres de Jésus.
24Pour vous, ce que vous avez entendu dès l’arkhê, que cela demeure en vous. – Et non pas comme les antichristoï, en qui la parole de Dieu entendue ne demeure pas. Comme l'a dit Jean auparavant : « et maintenant de nombreux antichristoï sont venus… Ils sont sortis de chez nous » (v. 18-19), donc ce sont des anciens appartenant plus ou moins aux premières communautés chrétiennes qui sont devenus des antichristoï dans le cas présent. « Mais ils n'étaient pas d'entre nous » (v. 19), parce que, lorsqu'on reçoit en vérité la christité, on ne la perd pas ; simplement ils pensaient eux-mêmes (nous aussi peut-être) qu'ils en étaient, et en sortant ils attestent simplement qu'ils n'ont jamais été dans la christité.
Si demeure en vous ce que vous avez entendu dès l’arkhê, vous demeurez vous aussi dans le Fils et dans le Père. 25Et c’est ceci la promesse qu’il nous a promise, la vie éonique (éternelle). »
● Versets 26-27.
« 26Je vous ai écrit ces choses à propos de ceux qui vous égarent (planôntôn). 27Mais vous, le chrisma – cette onction intérieure – que vous avez reçu de lui, qu’il demeure en vous. Et vous n'avez pas besoin que quelqu’un vous enseigne. – Si cette christité demeure en vous, quelqu'un peut bien vous enseigner, mais vous n'en avez pas le besoin. Vous pourriez par vous-même entendre les mêmes choses. Vous avez en vous de quoi entendre. – Mais comme le chrisma vous enseigne au sujet de tout, qu'il est vrai et qu'il n'est pas falsificateur (pseudos), et selon qu'il vous a enseignés, demeurez en lui. »
2) La christité.
Vous comprenez maintenant ce que j'essaie de dire en parlant de la christité. Enfin, vous comprenez partiellement ! En effet c'est le mot Christos qui prend ici de l'importance, donc qui demande à être entendu pour ce qu'il dit, comme une des dénominations, donc un des abords. Tout homme s'aborde par le nom qu'il donne de lui, quand le nom est profondément signifiant comme dans le cas présent.
● Le prédicateur "serviteur inutile".
"Vous avez en vous le chrisma" et vous n'avez pas "besoin" de moi. Alors, qu'est-ce que je fais ici ? Eh bien c'est la thématique qui est développée très abondamment par Paul, c'est que le prédicateur de la nouvelle alliance, celui qui fait le service de la nouvelle alliance, est un serviteur inutile[7] en vérité. Bien sûr il aide un peu. Peut-être que vous n'en avez pas le loisir, peut-être que vous n'avez pas la préparation suffisante, donc il est bon d'être aidé. Mais c'est vous qui entendez ou qui n'entendez pas.
Vous avez en vous de quoi entendre la nouveauté christique. C'est ce que le texte nous dit ici : vous avez reçu l'onction intérieure, l'onction du Pneuma Sacré, du Pneuma de consécration.
Le pneuma, nous l'avons étudié à différents titres ici sous un autre aspect, parce que le pneuma a une grande capacité de signification. Nous l'avons étudié comme énergéia, c'est-à-dire comme mise en œuvre, comme force active. Le pneuma est répandu, d'où l'importance extrême de l'Esprit Saint qui est la présence de l'activité de résurrection dans le monde.
Le Christ est « ressuscité d'entre les morts dans un pneuma de consécration », qui le consacre donc comme messie, c'est-à-dire comme devant être répandu sur la totalité de l'humanité.
● La christité en chacun.
► Est-ce que tout homme est oint ?
J-M M : Tout homme a potentiellement semence de christité, seulement elle peut rester dormante et inactive. Cette semence de christité est en même temps une semence de l'identité nouvelle de l'homme en Christ, puisqu'il s'agit d'une naissance nouvelle[8]. C'est une semence divine qui fait de l'homme un être divin.
Cette semence, Dieu la donne à tous, nous le savons. Mais le Dieu donne et la semence et la croissance, ce sont les deux moments. Le moment de la semence est celui des six jours de la création où Dieu ne fabrique rien mais dépose (dispose) les semences du monde, les semences de l'humanité[9]. Et le septième jour cesse le travail de déposition des semences mais commence le travail de croissance. Nous sommes dans le septième jour. C'est pour cette raison que les chrétiens disent : « nous sommes dans le dernier jour ». C'est que nous sommes dans le septième jour de l'histoire du monde. Cela ne se mesure pas en années, bien sûr.
Il est à présumer que le Dieu donne largement la croissance. Mais il faut bien savoir qu'il la donne à qui il veut, et à l'heure où il veut. Et « tu ne sais » l'heure ni le jour. Et non seulement tu ne sais de science certaine si tu as en toi la semence active, si ce que tu mets en œuvre est activité de Dieu. Ceci est très important parce que ça interdit de compter ceux qui relèvent du Christ. Comme le dit Augustin : « Certains se croient dehors (de l'Église) et sont dedans, et certains se croient dedans mais sont dehors ». Et ceci n'est pas d'ordre psychologique mais d'ordre méta-psychologique, c'est de l'ordre de « tu ne sais ».
Ce « tu ne sais » nous allons le rencontrer la prochaine fois de façon explicite, où nous verrons la glorification d'un non-savoir qui est une connaissance plus grande que le savoir.
C'est pourquoi vous ne pouvez pas dire : « celui-ci est un saint homme », vous n'en savez rien. « Il a donné tous ses biens », oui, bon, et après ? Pourquoi a-t-il donné tous ses biens ? Pour qu'on le prenne pour un saint ou… ? « Même si je me donne à la mort et que je n'ai pas l'agapê – car c'est la même chose d'avoir l'agapê ou d'avoir la christité – je ne suis rien ». C'est saint Paul qui le dit explicitement.
Donc cela je ne peux pas le dire d'autrui, mais je peux toujours rencontrer quelqu'un en saluant la semence de christité qui est en lui.
● Qui fait le bien ? La reconnaissance d'un non-savoir.
Tout ceci est assez complexe, parce que nous ne sommes pas compétents pour savoir ce qui est le bien : est-ce que je puis faire le bien sans avoir la foi ? La réponse classique des théologiens était : sans la foi tu peux faire un bien naturel mais il n'est pas salvifique. Ils faisaient la différence entre le bien naturel et le bien surnaturel[10], car sinon cela aurait signifié que les œuvres de ceux qui n'ont pas la foi étaient des péchés. Non ! Donc ils ont fait une tentative en parlant d'un bien qui n'a pas proportion avec la vie éternelle, à savoir d'un bien qui relèverait de la nature. Ils ont introduit cette notion indispensable de nature pour que la distinction puisse être faite. Mais ça aboutit à quelque chose d'absurde.
Il est plus intéressant de passer par la reconnaissance d'un non-savoir. Cela signifie que je ne peux pas dire non plus à quelqu'un de toute force que « il a la foi sans le savoir ». Je ne peux pas le lui dire car je n'en sais rien. Je ne sais même pas exactement quand j'ai la foi et quand je ne l'ai pas !
Quelle est la fonction de ce non savoir ? Pourquoi cela n'est-il pas de l'ordre de la conscience que j'ai des choses ? Voilà une question que, par rapport à l'histoire de la connaissance en Occident, je considère comme essentielle.
Vous ne verrez jamais à quel point l'Évangile est tellement étranger à notre langage ordinaire. Il est très simple quand il est considéré en lui-même, mais il est d'une extrême complexité et avec d'apparentes contradictions lorsqu'il est regardé à partir de nos prétendues certitudes. Voilà un point décisif.
II – Autre approche de la christité
1) Le rapport à autrui en christité.
● La communion des consacrés.
On peut compter les chrétiens, ce sont des gens inscrits quelque part. Ils savent bien qu'ils ne sont pas chrétiens parce qu'ils sont inscrits, mais qu'ils sont chrétiens parce qu'ils ont été baptisés.
Mais les christiques ne sont inscrits nulle part. Et si la notion d'ekklêsia[11] a pris un sens beaucoup plus complexe qu'on ne croit – il ne se réduit pas du tout à l'idée qu'on en a – cependant l'ekklêsia n'exclut pas la considération de ce qui s'appelle, même dans le Credo : la communion des consacrés[12].
Nous sommes enduits de divinité, donc nous sommes devenus des christiques (puisque Christos est celui qui est enduit, qui est oint) : nous sommes oints de divinité. Mais, et c'est là que je peux rappeler le mot d'Augustin, « Certains se croient dehors et sont dedans ; certains se croient dedans et sont dehors », je n'ai pas matière à les compter.
● Le rapport à autrui en christité et le terme de "serviteur inutile".
Autrement dit, quand je rencontre quelqu'un, je ne sais pas si la dimension christique est en lui, mais systématiquement je l'escompte dans mon interlocuteur, ce qui me met par rapport à lui dans une attitude tout autre. J'escompte dans mon interlocuteur la présence du pneuma, que le pneuma me précède quand je prétends le lui annoncer. C'est un thème fréquent chez Paul : nous ne sommes que des serviteurs inutiles parce que si nous sommes l'occasion, peut-être, de réveiller quelque chose en l'interlocuteur, ce n'est pas nous qui mettons une connaissance ou une chrismation, ou une présence de Dieu chez autrui. Le terme de « serviteur inutile » n'est pas une fausse humilité… c'est vrai en rigueur de terme.
Et le pneuma peut même se passer tout à fait de ma voix pour agir dans mon interlocuteur où, peut-être, il me précède. Autrement dit, cette considération de la dimension divine insue dans l'homme change mon rapport à l'homme. Vous me direz qu'il y a des hommes tels que, d'après leur comportement, il ne peut pas y avoir l'Esprit en eux. Moi je n'en sais rien. Je ne le sais pas : « Tu ne sais » ; « Ne dites pas : il est ici ou là ».
Cette considération de la dimension divine insue dans l'homme me pousse à parler de la christité, pour la différencier du christianisme ou de la chrétienté.
2) Brève histoire de la chrétienté et du christianisme.
Mais nous n'avons là que les tout premiers éclairages.
Je rappelle que la forme sous laquelle la chose du Christ s'est manifestée dans le monde a commencé par être un état de critique et de persécution, ce qui crée des conditions particulières.
● La chrétienté.
Mais rapidement c'est devenu un état de chrétienté, ou une ambition de ce que fut la chrétienté. Et dans la chrétienté, la tendance a été de sacraliser l'espace et le temps. Par exemple sacraliser l'espace en mettant des croix aux carrefours, en mettant des clochers d'Église qui sont à la fois religieux et signes de prospérité par rapport à une autre cité (où par exemple le clocher est moins haut et les cloches moins nombreuses). C'est de l'histoire banale, il n'y a rien de proprement sacral là-dedans. Ce qui est entendu et transmis par là, ce n'est pas le sens profond et originel de la chose, mais la chose déjà traduite dans une culture. Même la théologie n'a rien de sacral parce qu'elle est la traduction en langage occidental de la chose de l'Évangile, mais elle n'est en aucune façon commandée par l'Évangile. Tout cela se comprend, ça a un sens. L'Évangile est fait pour être prêché, et quand il s'adresse à une culture il faut bien qu'il parle le langage de cette culture.
Dans la chrétienté, la tendance a été aussi de christianiser la langue, de régir les choses. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'il n'y avait personne d'autre pour le faire en Occident. Dans la Gaule du VIe siècle, les seuls qui sont préfets ce sont souvent les évêques parce que les autres ne savent pas lire. Et par ailleurs, il y a toutes les œuvres de substitution qui sont extrêmement importantes : créer des écoles, des hôpitaux… Ce sont des manifestations du soin pour autrui, mais ce n'est pas la tâche propre de l'Église comme Église, c'est une tâche de substitution, une tâche d'agapê là où elle est. Alors le malheur c'est que, dans l'histoire, tout cela tend à se crisper. Et cela devient un pouvoir qui se manifeste, entre autre, dans le sacre des rois.
La chrétienté a investi une culture de telle sorte qu'elle s'est confondue avec cette culture. Pour autant, la chrétienté a eu des bienfaits dans l'histoire, ce que je dis n'est pas une critique de la chrétienté, mais c'est montrer que la fin de la chrétienté n'est pas à tous égards une perte.
● Le christianisme.
Cet ensemble a constitué un moment de chrétienté qui est révolu et auquel s'est substitué un moment de christianisme, à la Renaissance, peut-être au XVe siècle. La chose du Christ est alors un "isme" parmi les "ismes", c'est-à-dire un système de pensée, une organisation, ce que deviendra la notion de religion. La notion de religion elle-même, au sens où nous l'entendons aujourd'hui, est purement romaine, elle n'est même pas grecque. Chez les Grecs la religio est une vertu, ce n'est pas une institution[13].
● La question de l'institution Église.
La religio romana est une institution. L'Église s'est d'abord affrontée à cette institution, non pas de son fait, mais de par la persécution. Mais ensuite, on tend à se comprendre sur l'autre modèle du même, donc l'Église tend à se comprendre de façon privilégiée comme institution. Ce que je dis là ne condamne pas toute forme d'institution, c'est beaucoup plus subtil. Mais le modèle initial qu'annonce le mot Église, c'est l'institution, et cela perdure. Or, pour aborder l'Église, ce n'est pas le bon abord que de passer par l'étude des religions en général, comme s'il y avait quelque part des religions en général.
Donc, parce qu'un mode d'être a eu à s'affronter à une institution, il tend naturellement à se constituer en institution adverse. Or il y a bien quelque chose qui peut être considéré en un certain sens comme relevant de l'institution dans l'Évangile, mais cela ne nécessite pas pour toujours la forme qu'a prise l'institution ecclésiale. C'est la différence de statut entre la Scriptura qui est sacra et le droit canonique qui n'est pas sacré, et d'ailleurs il est emprunté au droit romain, il a tout le vocabulaire du droit romain.
C'est là qu'il faut faire des différences, pas forcément perceptibles de l'extérieur, dans l'organisation structurelle de ce qu'il en est d'être christique. En effet l'être christique se présente, donc demande à être vu, et pour cela il faut une signification minimale commune, ce qui demande une certaine gestion indiscutablement. Mais la place et la signification de l'institution n'est pas de même ordre que la place essentielle de l'Église au grand sens du mot. Ceci donne un autre aspect du mot christité, ça contribue à le configurer.
Le mot ekklêsia est un mot biblique, il a deux sens qui sont tensionnels, qui sont en rapport l'un avec l'autre. Ici je ne fais que donner les premiers indices concernant notre question initiale, mais il nous faut replonger profondément dans quelque chose qui est éminemment sacré.
Le Moyen Âge théologique ne confond pas ce qui relève du sacré et ce qui relève de l'institution, alors que le concile de Vatican II (1962-65) risque de gommer cette différence qui est pourtant essentielle[14]. Le concile de Vatican I (1870), lui, avait donné des précisions, dans l'institution, sur ce qui concerne l'évêque de Rome : sa primauté, les conditions d'exercice de sa parole etc. qui sont tout autre chose que ce que vous croyez, d'ailleurs. Il y a une amplification populaire de ce que signifie le pape qui est effrayante, elle rend service par ailleurs, mais elle comporte beaucoup de risques. La théologie authentique ne réclame pas cela, même la théologie romaine. Moi, j'ai appris la théologie à Rome, et rien de ce que je dis n'est contre la théologie romaine, il est contre la façon dont on entend la théologie romaine, parce que celle-ci ne dit pas du tout ce que vous croyez. L'intelligence populaire est ambiguë.
3) La question du dévoilement du sacré.
a) Approche de la question.
► Il y a une autre question qui nous a intéressés, c'est celle du témoin ou du témoignage, quelle est la place de ce témoin dans l'annonce du sacré, le dévoilement du sacré ? Est-ce que le sacré peut être dévoilé ou est-ce qu'il est condamné à rester caché ?
J-M M : Il n'est pas ou dévoilé ou caché, il est dévoilé et caché, du même coup et pour la même raison. Une vérité authentique n'existe que sortant de son propre silence. Dès qu'il y a deux termes, nous avons une tendance très courante à dire que ce sont des contraires. Mais justement, s'ils sont contraires, c'est qu'avant d'être des contraires, ils ont une affinité. Je vais vous expliquer un peu cela par deux exemples.
Un dromadaire et une pâquerette, ils sont "autres que", mais ils ne sont pas "l'autre de". "L'autre de" c'est une affinité positive.
Le jour et la nuit peuvent être considérés comme des contraires en un certain sens, mais, sans jour il n'y a pas de nuit, et sans nuit, il n'y a pas de jour. Le mot jour et le mot nuit n'existent que parce qu'avant d'être des contraires ils ont au moins cette affinité d'être des alternants. À propos de ces mots il faut voir ce qu'en fait chaque auteur. Jean a tendance à faire de la nuit le symbole de la ténèbre[15], mais ça n'en est que le symbole. Chez lui la ténèbre et la lumière sont des contraires, c'est une lutte ; mais dans le temps la nuit et le jour sont des alternants. Dans ce monde la lumière fait partie d'une alternance : « Et nous avons des nuits plus belles que vos jours » (Racine).
b) Penser "l'être à".
Il faudrait faire une grande réflexion sur l'altérité : le même et l'autre. Ce sont des mots fondamentaux qu'on ne pense pas suffisamment, et même pas du tout. On pense du pareil au même alors que le même n'est pas du tout le pareil.
Ce sont des choses auxquelles nous somment conduits par la nécessité de penser le rapport, la relation, les multiples modalités de l'être-avec ou de l'être-à, ou de l'être-par-rapport-à. Or il n'y a pas de méditation philosophique sur l'être dans l'Évangile, et l'usage du verbe être est tout à fait différent de ce qu'il est chez nous. Il est rarement employé sans additif : "être" c'est "être à" ou "être vers", à tel point que si on cesse d'être vers quelque chose, automatiquement on est vers l'autre chose. Être à la mort / être à la vie, tel est le langage de Paul.
c) L'insu dans le langage de saint Paul (Ep 3, 20).
Le langage de Paul et le langage de Jean sont très différents, et cependant ils disent, chacun à leur façon, la même chose.
J'ai parlé ce matin de l'insu à partie du "tu ne sais" de Jean. Paul ne prononce pas le mot d'insu ou de « tu ne sais », mais c'est une prière qu'il fait en Ep 3, 20 :
« À Celui (Dieu) qui peut faire au-dessus de tout en sur-débordement (huperekpérissou) par rapport à ce que nous désirons ou pensons… »
Le surdébordement, c'est ce qui dépasse la capacité de notre pensée, et même la capacité de notre désir. La donation de Dieu n'est pas dans la capacité de notre désir, il nous donne en surcroît la capacité de l'accueillir : il donne que je l'accueille. « Il donne et le vouloir et le faire » (Ph 2, 13), c'est un autre mot de Paul.
Ce qui me faisait dire l'insu comme ce qui déborde, c'est cette expression : « en surdébordement ». Je pense que c'est un mot que Paul fabrique, à moins qu'il n'existe dans ce grec tardif.
Chez Paul le discours déborde, alors que le discours de Jean est au contraire d'une sérénité tranquille. Paul aime les énumérations dont on ne voit parfois même pas l'ordre dans lequel elles sont faites. Le verbe découler est constant chez lui.
Il est très important de voir que la christité n'est pas au terme de notre pensée, au terme de notre désir. C'est une donation qui refonde et notre désir et notre pensée.
4) « Le pneuma me précède chez autrui. » La notion de serviteur inutile.
► Est-ce que vous pourriez nous expliquer ce que vous vouliez dire par « le pneuma me précède chez autrui » ?
J-M M : Ceci est très lié à la question de la parole du témoignant et à la notion de serviteur inutile. En effet ce n'est pas moi qui fais la conviction de celui qui acquiesce, c'est la donation du pneuma qui précède l'annonce, qui est donné pour l'accueil de l'annonce ; mais il n'est pas donné par moi, il précède ma parole. L'œuvre de Dieu précède ma parole chez mon interlocuteur.
Je sais que ma parole ne sera ni une parole de conviction logique ni une parole de rhétorique qui cherche à convaincre. Paul le dit constamment. La philosophie grecque, de très bonne heure, a distingué la logique comme élément essentiel de la connaissance, sous la forme de la parole. Elle est plus ou moins suscitée au départ par Socrate, un peu développée par Platon, mais surtout par Aristote, c'est ce qui donne les règles de l'argumentation. Cependant il y a une autre parole – ils sont très attentifs à cela parce que les Grecs sont des bavards incroyables – il y a la parole qui arrive à convaincre : c'est-à-dire que celle-là, même si le raisonnement est faux, si ça marche, elle est bonne. C'est la parole de l'avocat : même si l'argumentaire n'est pas bon, la parole de l'avocat est bonne quand son client est libéré. C'est la parole du politique, c'est la parole proprement démocratique : elle est bonne quand elle convainc. Il y a des procédures, des astuces, des moyens de convaincre indépendamment de la régularité de l'argumentation. Et enfin c'est la parole de la publicité : la publicité est bonne quand on achète, pas forcément pour la validité des raisons qui sont alléguées. Sous cette forme-là la parole de rhétorique est en voie de surpasser, de devenir la parole courante.
L'Évangile n'est ni parole de logique ni parole de rhétorique, c'est ce que dit explicitement saint Paul dans ces termes-là, parce qu'il connaît la logique et la rhétorique comme des modalités de la parole dans la philosophie grecque.
► Donc j'escompte dans mon interlocuteur la présence du pneuma, ce qui change mon rapport à l'autre ?
J-M M : C'est cela, mais attention : « j'escompte la présence du pneuma en lui » ça ne veut pas dire que je cherche à le convaincre qu'il est déjà croyant. Ce serait la pire des choses. S'il est croyant, je n'en sais rien. C'est pour cela que, ce faisant, je reste dans l'insu. Mais je peux, quant à moi, escompter que…, ça mobilise ma parole.
Est-ce que je suis croyant, je ne le sais pas avec absolue certitude pour moi-même, comment est-ce que je pourrais prétendre le dire pour autrui !
Voilà quelque chose d'assez important, parce que je crains qu'on utilise la notion de christité pour décider de par soi-même que l'autre est christique. Ce n'est pas non plus la question. L'insu ici est extrêmement important, c'est la chose capitale. C'est un bienheureux non-savoir.
Et pour une part et dans une autre direction, c'est très connu par la mystique occidentale elle-même : maître Eckhart[16], la mystique rhénane, la mystique espagnole…
► Est-ce que cette présence christique dans l'insu ne correspond pas aussi au fait que Dieu n'a pas lié la grâce aux sacrements comme le disaient les théologiens[17] ?
J-M M : Oui, tout à fait. La grâce est répandue beaucoup plus largement, peut-être à un niveau où elle ne sait pas se dire mais où elle agit. Et il est très important de considérer de telles actions sans les baptiser. Ne vous hâtez pas de dire que c'est l'Esprit-Saint. Et peut-être d'ailleurs que l'Esprit agit profondément chez les athées pour débouter les prétendus croyants de leurs prétendues croyances !
Il y a là-dedans quelques paradoxes apparents mais avec un fond de vérité extrêmement important. Et tout ceci est lié au fait que le pneuma n'est pas quelque chose de l'ordre du psychique ni du connaître au sens banal du terme.
[1] Le I vient de NOUVEAUTÉ CHRISTIQUE chapitre III : La nouveauté christique dans la 1ère lettre de saint Jean avec des ajouts venant de la session Connaître-aimer sur la 1ère lettre de Jean et de la session sur la Symbolique des éléments ; le II vient de Le SACRÉ dans l'Évangile. Ch IV : Approches du sacré dans l'Ekklésia (dans l'Eglise) .
[2] J. Pierron était un ami de Jean-Marie Martin, voir Qui est Joseph Pierron ? Présentation suivie d'un psaume et de deux prières pour Noël.
[3] Cf. Le Pneuma (l'Esprit Saint) chez saint Jean : repères ; symboliques (eau, feu, amour, connaissance, onction, parfum...) .
[4] Par exemple : « Dieu nous a donné les arrhes du pneuma » (2 Cor 5, 5).
[6] Voir le cahier Prologue (2ème édition), ch II, Première partie, le 5) : La théophanie initiale du Baptême.
[7] C'est un mot de saint Luc (cf Lc 17, 7-10).
[10] « Dans l'état de nature intègre (avant le péché), l'homme a besoin d'une vertu surajoutée à la vertu naturelle uniquement pour accomplir et vouloir le bien surnaturel. Mais, dans l'état de nature corrompue, il en a besoin à un double titre : d'abord pour être guéri ; ensuite pour accomplir le bien surnaturel, lequel est le bien méritoire. » (Saint Thomas d'Aquin, Somme Théologique, Ia- IIae 109 a2)
[11] Au chapitre VII, J-M Martin fera la distinction entre l'ekklêsia au petit sens (qui correspond à l'Église) et l'Ekklêsia au grand sens qui correspond à la totalité de l'humanité. Pour distinguer les deux, nous notons le premier sens avec un "e" minuscule : ekklêsia. Nous écrivons ekklêsia et non ecclêsia pour mettre en évidence que l'Ekklêsia est la totalité de l'humanité convoquée (klêsis désigne l'appel).
[12] Dans le Credo : « Je crois… à la communion des saints… »
[13] Ceci est repris au II 3) c de Le SACRÉ dans l'Évangile. Ch VI : Le couple mustêrion/apocalupsis (caché/dévoilé) ; les sacrements (§ Le langage des vertus).
[14] Cf. Différents sens du mot Église (Ekklêsia) chez st Paul et au Concile Vatican II. Qu'est-ce que la "sainte Église catholique" ?.
[15] En Jn 13, 30 : « Prenant donc la bouchée, celui-ci (Judas) sortit aussitôt, il était nuit ».
[16] « Nous disons donc que l'homme doit être aussi pauvre en volonté que lorsqu'il n'était pas. C'est ainsi qu'étant libre de tout vouloir, cet homme est vraiment pauvre. Pauvre en second lieu est celui qui ne sait rien. Nous avons souvent dit que l'homme devrait vivre comme s'il ne vivait ni pour lui-même, ni pour la vérité, ni pour Dieu. Nous allons maintenant encore plus loin en disant que l'homme doit vivre de telle façon qu'il ne sache d'aucune manière qu'il ne vit ni pour lui-même, ni pour la vérité, ni pour Dieu. Bien plus, il doit être à tel point libre de tout savoir qu'il ne sache ni ne ressente que Dieu vit en lui. Mieux encore, il doit être totalement dégagé de toute connaissance qui pourrait encore surgir en lui. » (Maître Eckhart, sermon 52, Beati pauperes spiritu).
[17] Cf au I, le dernier paragraphe du 1) b) "État de grâce".