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La christité
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  • Ce blog contient les conférences et sessions animées par Jean-Marie Martin. Prêtre, théologien et philosophe, il connaît en profondeur les œuvres de saint Jean, de saint Paul et des gnostiques chrétiens du IIe siècle qu’il a passé sa vie à méditer.
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20 septembre 2013

Qui est Jean-Marie Martin ?

Dans ce "message" après une présentation assez rapide de J-M Martin, chacun de ses centres de recherche est un peu développé : l'évangile de Jean ; les lettres de Paul, les Pères de l'Église ; la dogmatique ; les gnostiques ; les religions ; la philosophie ; la poésie. Ensuite il y a la liste de certaines de ses publications. Enfin sont cités quelques-uns des lieux de ses anciennes interventions en dehors de ses cours à l'Institut Catholique de Paris. Tout ce qui est entre guillemets est de J-M Martin et vient d'interventions diverses dans le temps car il ne parle de lui qu'en passant. 

J-M Martin nous a quittés le 12 octobre 2021, la cérémonie d'enterrement a eu lieu à Saint-Benin-d'Azy le 20 octobre à 15 h 30.

Un autre message, cette fois chronologique donne le parcours de J-M Martin : Parcours de Jean-Marie MARTIN (1927-2021) augmenté d'anecdotes.

 

 

Qui est Jean-Marie MARTIN ?

 

 

 

Jean-Marie Martin, prêtre, chercheur en théologie et philosophie, a exercé jusqu'en 1993 à l'Institut Catholique de Paris comme enseignant et directeur de département.

Jean-Marie MartinIl est originaire de la région de Nevers, et en début de carrière il a passé un certain nombre d'années à l'université pontificale de Rome : dans un premier séjour il a étudié la dogmatique, avec une plongée dans la pensée de Thomas d'Aquin, puis il a enseigné la dogmatique ; et dans un deuxième séjour il a suivi entre autres les cours du Père Antonio Orbe, jésuite, spécialiste des Pères de l'Eglise et des premiers gnostiques chrétiens, ce qui lui a fait modifier sa façon de faire les cours de dogmatique.

Parmi ses activités de retraites, il a poursuivi ses travaux sur les textes du Nouveau Testament, plus particulièrement ceux de saint Jean et saint Paul, et sur les commentaires faits par des auteurs des premiers siècles, éventuellement gnostiques. Il en a présenté une lecture en divers lieux. Il a animé aussi des groupes qui se réunissaient régulièrement, pour lire saint Paul par exemple ; certains concernaient la philosophie, en particulier la lecture de Heidegger.

Les sessions de Jean-Marie et les rencontres à Paris étaient des lieux très libres où alternaient les exposés du "maître" et les échanges avec son auditoire. Mais la manière dont il conduisait ses discours était très loin d'une présentation universitaire classique. Tout d'abord, il adoptait fréquemment la structure : trouble, recherche, demande-prière, structure fréquente en saint Jean. Ensuite il parlait en général sans notes avec seulement le Nouveau Testament écrit en grec sous les yeux. De toute façon, un thème en appelle un autre et les parenthèses s'ouvrent généreusement quand l'occasion s'en présente. Et nous l'écoutions dérouler le fil d'une pensée qui se construisait devant nous, telle une méditation.

Pour lui, « annoncer l'Évangile, c'est en rendre l'écoute possible, c'est-à-dire le présenter dans sa saveur, dans son caractère vif, dans sa cohérence et dans sa vitalité propre. »

 

I) SES CENTRES DE RECHERCHE

 

Il s'intéresse en priorité à l'évangile de Jean et aux premiers lecteurs de cet évangile.

  • « Quand je dis qu'il faut commencer par lire saint Jean sinon on ne comprend rien à Marc et à Luc, on prend cela pour une plaisanterie. C'en est un peu une, mais c'est profondément vrai. La plupart des mots énigmatiques, de type sapientiel, qui se trouvent dans les Synoptiques, s'expliquent chez Jean. On pense que Marc est simple, alors qu'il est beaucoup plus difficile que Jean. Jean est une bonne introduction parce qu'il déploie un certain nombre de choses qui restent énigmatiques dans les Synoptiques. »
  • « Toutes les lectures que nous pouvons avoir faites au cours des siècles, et pourront faire au cours des siècles à venir n'épuisent pas le texte johannique. L'Église a privilégié des interprétations d'une façon qui s'explique très légitimement par le souci missionnaire. Et naturellement les structures de pensée - voilà le mot majeur - qui président à l'écriture johannique me paraissent plus proches des premiers lecteurs gnostiques que ne l'est le langage de la mission, c'est-à-dire de ce que va développer le langage ecclésiastique que nous connaissons. »

 

Il est aussi un grand lecteur de Paul.

  • « Pour le fond saint Paul c'est la même chose que saint Jean. Rien n'est plus le même mais aussi rien n'est plus différent comme langage ! »
  • « La pensée de Paul est de toute première importance dans la constitution de la foi chrétienne, mais par ailleurs elle donne lieu à beaucoup de méprises graves. »

 

Il est dogmaticien de formation et parle souvent de l'histoire des doctrines chrétiennes.

  • « Tout d'abord j'ai vécu dans saint Thomas d'Aquin de façon heureuse pendant 15 ans, donc connaissant bien les articulations fondamentales issues de la dogmatique. Ensuite j'ai été amené à travailler sur le IIe siècle en patristique où j'ai vu que structurellement ce n'était pas le même discours. Puis j'en suis venu à voir le IIe siècle en tant que lecteur de Jean et lecteur de Paul, donc je suis venu à l'Écriture (je ne suis pas bibliste de formation) en partant de la dogmatique, mais en en partant de bonne façon, pas de façon honteuse, en sachant qu'elle a sa fonction mais qu'il ne faut pas confondre la fonction de la dogmatique avec une authentique approche de ce qu'est la Parole révélée.
      Ma première découverte c'est que, sans doute, le dogme a un sens et qu'il a une fidélité fondamentale avec l'Écriture. Mais ce qui est très clair c'est que la structure de parole, et par suite la teneur, le tenant et la tonalité, ne sont pas les mêmes chez saint Thomas d'Aquin et chez saint Jean.
      Très longtemps la théologie s'est crue obligée de retrouver formellement dans l'Écriture ce qui était à professer, donc, de faire une sorte d'apologétique, et le risque très souvent est maintenant de faire une lecture de l'Écriture avec mauvaise conscience, parce qu'on est fondé effectivement à apercevoir que ce n'est pas la même chose. Si la théologie ne se donne plus pour tâche de se justifier à partir de l'Écriture, et si elle se donne pour tâche, au contraire d'apercevoir la différence féconde qui existe entre la théologie et l'Écriture, c'est là, peut-être, que beaucoup de choses s'ouvrent. La différence était considérée comme une différence négative : lire autrement, c'était l'hérésie ! Or, pas nécessairement. Il y a une vraie différence, mais une différence utile. Ça devrait être la tâche maintenant de faire cela. Ce qui donne une attitude qui n'est ni le conformisme du théologien classique, ni la prétendue et idiote révolution de l'exégète qui croit tout d'un coup balancer tout le reste. »
  • « Les dogmes ne sont pas faits pour qu'on les répète sans plus. Ils posent un certain nombre de jalons infiniment précieux. Sans certains de ces fichus dogmes, je ne pourrais pas accéder à l'Évangile comme il convient. Néanmoins les répéter pour le sens qu'ils avaient, surtout dans le moment où ils ont surgi et pour ce que j'en entends aujourd'hui, ce serait la pire façon de s'approcher de l'Évangile. J'ai dit aussi que la dogmatique pouvait constituer le pire obstacle que nous avons pour entrer dans l'Évangile. C'est vrai, mais ceci ne signifie nullement que c'est insignifiant. Ce n'est pas le chemin nécessaire, et néanmoins ça n'est nullement insignifiant. »

 

Il fréquente beaucoup les premiers Pères de l'Église.

  •   « Le malheur est que l'on considère souvent les Pères du IIe siècle, ces écrivains, comme un peu sommaires, archaïques, par rapport au caractère décidé que prendra ensuite le discours chrétien. Je crois qu'il n'en est rien. Il se passe pour eux ce qui se passe en philosophie pour ceux qu'on appelle les présocratiques. Déjà, le nom qu'on leur donne les situe par rapport à autre chose qu'eux-mêmes et traduit l'idée qu'ils précèdent l'avènement de la philosophie qui vient avec Socrate, Platon et Aristote. Or ces pré-socratiques ont une pensée très intéressante qu'il faut considérer pour elle-même. Même chose pour les Pères de l'Église, ceux-là que j'ai fréquentés le plus : ils sont intéressants pour eux-mêmes mais aussi parce qu'ils sont dans une certaine proximité avec les sources. Les problématiques, chez eux, sont souvent tâtonnantes. Mais, comme ils partent de l'Évangile,  revenir à eux pourrait nous faire du bien et nous aider à chercher quel type de discours nous pourrions tenir à partir de l'Évangile, qui ne soit pas simplement le discours dogmatiquement figé une bonne fois pour toutes. »

Antonio OrbeLorsqu'il a fait ses études à l’Université Grégorienne de Rome, J-M Martin a suivi les cours du Père jésuite Antonio Orbe (1917-2003), et c'est celui qui l'a le plus marqué. Le Père Orbe a enseigné à la Grégorienne pendant 40 ans, de 1949 à 1992, il était spécialiste notamment de la théologie patristique des tout premiers siècles. On vient d'éditer en français une partie de son œuvre : Introduction à la théologie des IIe et IIIe siècles (2 tomes).

  • « Lors de mon deuxième séjour à Rome, j'ai eu un professeur, le Père Antonio Orbe, absolument remarquable, pour l'introduction à la lecture des Pères de l'Église. Jusque-là je ne les avais pas fréquentés. J'ai vécu quinze ans largement dans saint Thomas d'Aquin, tout à fait heureux, comblé, soit comme étudiant, soit comme enseignant. Avec Antonio Orbe j'ai appris à lire, c'étaient des travaux pratiques. Pendant une année on a lu un traité de Tertullien du IIe siècle, l'Adversus  Hermogenem, et on est arrivé à peine au bout du 1er chapitre. Et lire ce texte avec intelligence, attention, a commencé à m'apprendre à lire. Je ne crois pas trop aux biblistes, moi je suis venu à la Bible par l'intermédiaire des premiers Pères de l'Église, donc rétrogressivement. »

 

Il lit le Nouveau Testament en grec et l'Ancien Testament en hébreu.

Quand J-M Martin parle il n'a en général devant lui que le Nouveau Testament en grec. Il connaît de nombreuses autres langues, par exemple l'italien puisqu'il a vécu pas mal de temps à Rome, il cite des poètes en allemand... Il connaît l'hébreu et aime souvent à citer de mémoire des passages de l'Ancien Testament en hébreu. Pour entendre le sens de certains mots comme les mots grecs arkhê et logos du Prologue de Jean il recourt à l'hébreu et même à l"araméen.

Il était ami de Joseph Pierron.

C'est en 1979 qu'il rencontre Joseph Pierron (1922-1999) qui a été directeur et professeur d'Écriture Sainte au séminaire des Missions Étrangères, spécialiste de la période comprise entre  le IIe siècle avt JC et le IIe siècle après JC, ayant fait une thèse à l'Institut Biblique de Rome (voir Qui est Joseph Pierron ?). Un jour où J-M Martin commentait le texte de Ph 2, 6-11 il a raconté leur rencontre :

  • « C'est un texte que j'ai commenté il y a une vingtaine d'années dans un petit article pour la revue Spiritus. Celui qui était chargé de cette revue était Joseph Pierron. Le texte avait été demandé par l'intermédiaire de Gabriel Espie. C'est par là que j'ai connu Joseph Pierron. Il a beaucoup aimé l'article et j'en ai été très touché. L'article s'intitulait Résurrection ou création. »

Joseph écoutait ce que disait Jean-Marie à Saint-Bernard de Montparnasse, il écoutait également ce qui se disait lors des rencontres animées par Jean-Marie sur Heidegger. Dans ce que disait Joseph à Saint-Merri ou au CIF se retrouvent de nombreux  thèmes chers à Jean-Marie et bien évidemment aussi des différences. Et il n'y a pas de doute que, réciproquement, J-M Martin profitait de la grande culture biblique de Joseph.

De ce fait, des enseignements de Joseph Pierron figurent sur le blog (tag Joseph Pierron)

 

Il fréquente les Gnostiques et a participé à la traduction de deux textes gnostiques.

  • « En 1957 j'entrais pour la première fois dans la problématique des gnostiques, et il faut dire que, depuis ce temps, il n'y a pas de jour où je ne les ai fréquentés. »

Le Père Antonio Orbe a été très important dans son approche des gnostiques du IIe siècle. En effet le Père Orbe étant spécialiste des pères de l'Église s'est intéressé aux gnostiques qui étaient réfutés par les pères de l'Église.

J-M Martin a aussi été formé par un professeur éminent, Henri-Charles Puech. Celui-ci a écrit un livre magnifique, La Gnose et le temps, et a ensuite commenté L'évangile de Thomas (c'est l'un des premiers à le faire).

  • En particulier J-M Martin a participé à un séminaire sur l'un des textes en copte trouvés à Nag-Hammadi, l'Évangile de la Vérité «séminaire dans lequel étaient Puech, Hadot, Tresmontant. Le projet était de faire une rétroversion hypothétique en grec du texte copte. C'est pourquoi il y avait dans le groupe des coptisants, des spécialistes du grec, des connaisseurs de la Gnose, etc. En effet il faut une équipe pour traduire cela. Il est probable que le texte avait d'abord été écrit en grec et ensuite traduit en copte, puisque l'Égypte a reçu, à un certain moment, beaucoup de ces textes et les a traduits. Le texte copte a été publié dans la grande édition de Puech, et dans la petite édition de son assistant, Joseph Ménard, chez Letouzey et Ané. On y trouve également le texte grec, qui est l'essai de restitution à partir du texte copte, mais aussi une traduction française. »

Odes de Salomon, Marie Joseph PierreCe qui intéresse J-M Martin c'est le tout premier gnosticisme dont « les traces sont par exemple dans les Odes de Salomon, un magnifique texte que nous possédons en syriaque et que j'ai contribué un peu à éditer avec une de mes anciennes élèves qui a été professeur de syriaque pendant une douzaine d'années à l'école biblique de Jérusalem . » Il s'agit du livre Les Odes de Salomon traduits et annotés par Marie-Joseph Pierre, éd. Brépols 1994 (voir ci-après au début du II Publications, ce que dit M-J Pierre).

 

Il préfère parler de "sources" plutôt que de "religion".

J-M Martin est très critique vis-à-vis des études portant sur les religions. Par exemple lors d'une session il disait :

  • « Il ne faut jamais essayer de penser le sacrement à partir d'une étude sociologique du rite en général, cela n'a pas d'intérêt. C'est fréquent dans la théologie aujourd'hui. Voyez à quel point on a réduit la richesse extrême des attitudes essentielles dans l'humanité, et des sources et des figures qui ont porté cela dans les temps et les lieux qu'on appelle abusivement des religions ! Religion est un concept occidental qu'on attribue aussi bien à l'Évangile, où le mot ne se trouve jamais, qu'au Bouddhisme qui récuse être une religion.
       La véritable universalité, le véritable dialogue, ne passera pas par la réduction à un minimum commun, à la superficie des choses. En particulier, il ne passera pas essentiellement par la production de textes difficultueusement négociés pour rabouter des accords. Un texte négocié est un texte qui n'a aucun élan, aucune créativité, ce n'est pas un texte qui parle. Je sais que ça vaut mieux que la Saint-Barthélemy. Oui, je le reconnais, mais le véritable dialogue se produira peut-être eschatologiquement seulement ! Il se produira lorsque chacun sera, non pas à la superficie de sa tradition, mais au profond de sa source. C'est au profond des sources que les sources entendront le plus divers comme disant le même. Les sources parlent entre elles. La vraie parole est la parole de source à source. C'est une parenthèse ceci. Mais c'est aussi une chose qui aurait son importance dans une réflexion sur ce qu'il en est d'un souhaitable œcuménisme. »

Il lit des textes venus d'autres traditions. En particulier il est en contact avec l'hindouisme par l'intermédiaire de Yvon le Mince, et il est en contact avec le bouddhisme par l'intermédiaire de Dennis Gira (chrétien spécialiste du bouddhisme) avec lequel il a animé, entre autres, une session intitulée "Christ et lotus" en 1992 à l'Institut Catholique de Paris, Dennis ayant participé à des sessions de Jean-Marie.

Il refuse les études générales sur les religions mais évoque parfois ce qu'il appelle des analogies de configuration. Par exemple il met souvent en rapport le masculin-féminin biblique et le yin-yang. Une fois il parlait de la thèse fondamentale de Paul, le fait qu'on n'est pas sauvé par la pratique de la loi, mais qu'on est sauvé par grâce c'est-à-dire par donation absolument gratuite, et il a mis ceci en rapport avec le karma bouddhique :

  • « D'une certaine manière, chez les bouddhistes, la roue de la rétribution, cette roue du destin, est ce qui gère le samsâra : que le karma soit bon ou mauvais, cela a des conséquences, mais en aucune façon le bon karma ne constitue l'éveil. (...) Ce qui est important  c'est que pour les bouddhistes le circuit de la rétribution est cassé par l'éveil. Or éveil et libération sont deux mots qu'on trouve dans l'Évangile. Egeireïn ça veut dire s'éveiller et c'est un des mots qui disent ressusciter ; et littéralement c'est se réveiller. Et là mon propos n'est pas de faire un parallélisme facile et hasardeux. Mais voyez pourquoi j'indique cela, parce que quelquefois, prendre ne fut-ce qu'un ou deux pas de distance par rapport à sa propre tradition, cela peut être une excellente façon pour la revoir autrement que dans les ornières habituelles. Rien n'est pareil mais on aperçoit toutefois des analogies de configuration, un bon mode d'approche mais sans plus. »

 

C'est aussi un grand lecteur de Heidegger.

  • « J'essaye de désoccidentaliser purement et simplement l'écoute de l'Évangile qui n'est pas fait simplement pour être annoncé à l'Occident, mais pour être annoncé à toutes les cultures du monde. Et il est important que je ne confonde pas ce que mon oreille occidentale entend de l'Évangile avec ce que quelqu'un d'autre est susceptible d'en entendre. »
  • « Il y a deux choses essentielles à faire : il faut garder une distance par rapport à sa propre culture, et cela nous avons du mal à le faire ; et il faut écouter à neuf l'Évangile. C'est pour cela que je me suis promené avec saint Jean dans la main droite et Heidegger dans la main gauche. En effet Heidegger est le grand lecteur de l'Occident et de l'état dans lequel se trouve l'Occident dans son histoire, dans son mouvement. Il est certain que tous nos discours sont posés sur des déterminations, des répartitions, des présupposés, des choses que nous ne pensons pas mais qui constituent le fonds à partir duquel nous pensons. Or ce fonds-là (cet héritage culturel) n'est pas le même que celui de l'Évangile. »
  • « J'ai dit que je marchais en portant saint Jean de la main droite et Heidegger dans la main gauche : les deux sont absolument nécessaires, parce que c’est ce qui rend possible un dialogue authentique, et non pas des synthèses hâtives ou des confusions, entre mon natif qui est occidental et l’Évangile – car  je suis profondément  occidental, je ne joue pas à être oriental – et en ce sens-là, l’Évangile n’est pas fait pour constituer une culture. »

 

Il est poète à ses heures et a animé pendant plusieurs années un groupe poétique

  • Jean-Marie Martin, Nevers 2012«  À la période où j'enseignais, chaque année à la fin des cours, évidemment je fermais tout, j'allais dans le midi. J'y passais un mois et je voulais voir si ce que j'avais aperçu dans l'année, sans le type de discours dans lequel je l'avais aperçu, ça pouvait chanter et venir sous une autre forme dans le poème. Je mettais un mois et je revenais toujours avec un grand poème. »
  • « Un symbole du symbole, c'est le travail poétique. Ce travail est apparemment un travail. En fait, il n'en est pas un. Le poème se donne. Et néanmoins, il faut un prodigieux labeur pour écarter tout ce qui n'est pas, car le mode sur lequel il vient ne me dit pas d'abord ce qu'il est, mais me fait savoir ce qu'il n'est pas. Il y a tout un travail de désencombrement, d'exclusion, de négation pour que la chose puisse venir d'elle-même. C'est un analogue de ce qu'est la véritable écoute de l'Évangile. »

Il fait des poèmes rimés, comme il le dit dans un poème qui parle « dans le domaine symbolique de la chance que le poète attend, avec beaucoup de travail mais sereinement. »

« J'ai compté sur les doigts des fées
Et pour inventer le trésor
De quelque rime née coiffée
Serein j'interrogeais les sorts. »

 

Il est l'ami de peintres et a publié des préfaces pour l'un d'eux Mathigot.

Ses grands poèmes J-M Martin les a fait dans la maison de Mathigot  qui dit ceci dans un petit mot qu'il m'a envoyé :

« Notre amitié date d'une cinquantaine d'années. Pendant plus de trente ans, Jean-Marie, chaque été, séjournait dans ma maison du Gard. Précisément au petit village de Sérignac. »

Vous trouverez plusieurs préfaces écrites par J-Marie avec les tableaux correspondants, ainsi que des textes écrits pour le catalogue d'expositions, entre autres :

  • « La grandeur et le péril propres à la peinture résident dans son silence. La parole ne lui assigne pas son lieu. C'est l'indicible lumière qui ouvre l'espace » ;. et tout à la fin : « Mais le texte ne peut donner de voir la peinture, singulièrement celle de Mathigot. La tâche se bornait ici à faire taire en nous les mots préjugés, qui brouillent le regard. D'inviter aussi à l'essentiel, qui est de regarder, inlassablement, et, si possible, de voir.» (Texte écrit lors de l'exposition de Mathigot en 1987)

 

Une dernière remarque sur sa façon d'enseigner à l'Institut Catholique.

  • « Vous savez, et de cela on m'accuse volontiers dans certains milieux, que je ne procède pas par l'énumération d'une bibliographie. Cela ne relève pas chez moi d'une négligence ou d'un oubli, mais d'une conviction, à savoir que la doxographie, c'est-à-dire l'énumération de la pensée des autres, n'est pas une pensée, et n'est même pas le commencement de la pensée, et même que c'est peut-être un obstacle à la pensée. La méprise est assez facile pour que j'insiste sur cette conviction, et que je la mette en pratique de façon délibérée, parce que très rapidement on ne sait plus ce que c'est que penser.
      Dans mon cours, mon but n'est même pas de vous dire ma pensée, moins encore d'énumérer les diverses pensées possibles sur un thème, mais d'apprendre à poser avec d'autres des actes théologiques : "poser un acte", ce n'est pas donc une répétition ; "avec d'autres" c'est-à-dire en référence avec l'histoire et la demeure ecclésiale, l'histoire et le maintenant, et "avec" ne veut pas dire nécessairement "en conformité", mais dans le juste débat. Voilà quel est mon but ici : non pas de livrer les choses qu'il faudra répéter, mais d'apprendre à poser avec d'autres un acte théologique, un acte de pensée. »

 

II) Ses publications

 

Jean-Marie Martin a participé à plusieurs livres, entre autres :

- Il a participé à deux documents de catéchèse parus sous la direction de Jean-Pierre Jung : Souffrir : la foi au pied du mur (Paru en Janvier 1990) et Pour oser dire : Notre Père (Paru en Mai 1993)  (Coéditeur : Centre National de l'Enseignement Religieux (CNER)

- Nous avons déjà signalé sa participation au livre Les Odes de Salomon (texte rédigé en syriaque), traduction et notes par Marie-Joseph Pierre, éd. Brépols 1994 qui parle de J-M Martin à la fin de son avant-propos : 

« C'est à la fois pour le fond et pour la forme, que la pertinence des remarques de mon maître et ami Jean-Marie Martin furent des plus précieuses. Sa longue méditation et sa connaissance familière de saint Jean et des textes gnostiques - il fut l'élève d'A. Orbe à Rome et de H-CH. Puech à L'EPHE - le rendent capable de saisir quasi immédiatement ce qui est en cause dans " Les Odes ", et de réclamer la plus grande précision dans l'emploi du vocabulaire technique théologique. Faut-il ajouter qu'il est lui-même poète et donc particulièrement sensible à la profondeur d'écho ainsi qu'à la qualité littéraire de ce qui demeure malgré tout une traduction ? »

 

SES ARTICLES

Du temps où il enseignait, il a publié quelques articles dans des revues mais il n'a jamais voulu publier de livre. Ses articles sont difficiles d'accès pour la plupart, et gagnent à être lus quand on est déjà entré un peu dans sa pensée ! Lui-même en parle à propos de l'article "Prier avec saint Jean" :

  • « J'ai écrit jadis un petit article dans la revue Catéchèse qui s'intitule "Prier avec saint Jean" où sont examinés des textes de saint Jean (chapitres 14, 16, 20 puis 12). J'aimerais vous aider à le lire parce qu'il est d'une précision qui le rend quasi illisible ! je veux dire par là qu'il y a dans ces 8 pages un bon mois de travail, et le résultat n'est pas très efficace : il faudrait un mois pour le lire !! Quand on me demande : "Pourquoi n'écrivez-vous pas un livre ?", la vraie réponse est là. Mon mode d'écriture n'est pas ajusté au mode moderne de lecture. C'est comme ça et je ne m'en plains pas

Liste d'articles (la plupart figurent dans le tag articles) :

  • Évangile, Eucharistie, Église. Christus n° 76, Octobre 1972. p. 534-546.
  • Écoute de la parole et compréhension du magistère. Revue Recherche et débat n° 79, DDB 1973, p.175-184. Cet article en tant que tel ne figure que dans un fichier pdf disponible en lecture ou téléchargement, il n'y a que quelques extraits cités sur le blog lui-même. Dans le fichier pdf il est accompagné de commentaires faits par J-M Martin dans l'un de ses cours à l'Institut Catholique. Dans le fichier pdf il y a également un court texte complémentaire à l'un des commentaires, et une réflexion "Statut de l'obligation dans l'Évangile de la liberté" qui, elle, figure intégralement sur le blog.
  • Université et catéchèse, p. 231-235 de la revue Catéchèse, n° 59, avril 1975 (La formation : mutations et enjeux). Cet article n'est pas sur le blog.
  • Résurrection et création p. 273-281 de la Revue Spiritus en 1979
  • Corps et parole. revue Religieuse d'action hospitalière et sociale, septembre - octobre 1982, N° 291, pp 386-392.
  • Prier avec saint Jean, p. 89-96 de la revue Catéchèse  en 1983.
  • Masculin féminin chez saint Paul (thème d'une symbolique). Christus n° 129, 1986 p. 39-48.
  • Les eaux usées de l'Occident, Christus n° 153, Janvier 1992, p. 51-60.

 

PREFACES.

Il a aussi préfacé plusieurs livres, dont celui de Régine du Charlat Comme des vivants revenus de la mort, Bayard 2002 (voir Comme des vivants revenus de la mort, livre de Régine du Charlat, préface de Jean-Marie Martin).

Il a fait des préfaces pour son ami peintre Mathigot (voir le tag Mathigot-peintre)

Son ami Michel Corbin lui a dédié l'une des six études de son livre L'Inouï de Dieu, DDB 1980, et de nouveau dans le nouveau livre de L'Inouï de Dieu paru en février 2023 dans la Collection Cerf Patrimoines.

 

III) Quelques-unes de ses interventions

en-dehors de ses cours à l'Institut Catholique de Paris

 

De 1981 à 2012, accompagné de son ami Maurice Bellet qui est prêtre et qui a fait une psychanalyse, J-M Martin a ouvert à Paris deux soirs par mois un espace d’écoute / parole dans un espace public : la salle d'accueil de la chapelle Saint Bernard, sous la gare Montparnasse. M Bellet parlait une heure en présence de J-M Martin, puis après une pause, J-M Martin parlait une heure en présence de M Bellet. Dans les dix premières années J-M Martin a lu des chapitres de l'évangile de Jean et de la première lettre de Jean puis, pendant trois ans, les chapitres 1 à 6 de l'épître aux Romains. À partir de 1998 il a pris des thèmes (La Vie éternelle, Le "Je" christique, La prière, Les échos du Notre Père en saint Jean, Le Monogène, L'espace johannique, Le temps johannique, La vérité en saint Jean, Connaître chez Jean).

 

Pendant une vingtaine d'années il a animé des week-ends à l'Ermitage à Versailles : L'aveugle-né (Jn 9) ; Le pain de la vie (Jn 6) ; La femme adultère (Jn 8, 1-11) etc..

Pendant plus d'une dizaine d'années il a animé des week-ends à l'Arbresles près de Lyon : Odeur et mémoire Jn 12, 1-19) ; La joie etc…

Pendant de nombreuses années il a animé des sessions à l'Institut Catholique de Paris. En 1992 c'est avec Dennis Gira (chrétien spécialiste du bouddhisme que J-M Martin connaît bien) qu'il a animé la session intitulée "Christ et lotus".

Depuis 1997 il anime un week-end à Nevers au printemps à l'espace sainte Bernadette, et jusqu'en 2010 il animait une retraite d'une semaine en juillet. Quelques thèmes : Joie et pâtir en saint Jean et saint Paul ; Le Credo ; Le signe de croix, signe de la foi (en saint Jean, saint Paul et chez les premiers Gnostiques chrétiens). En 2014 ce sera sur le Sacré médité à partir de l'évangile de Jean, c'est la première fois que ce thème est pris.

Depuis de nombreuses années il anime une retraite d'une semaine à Saint-Jacut en octobre ; La joie en saint Jean ; Enfants de Dieu etc…

A partir de 1999 (au moins) jusqu'en 2015 il a animé une session d'une semaine à Saint-Jean de Sixt en Haute-Savoie : La symbolique des éléments ; Le Prologue de Jean ; Le pain et la parole (Jn 6) ; La Passion (Jn 18-19) ; La Résurrection (Jn 20-21) ; Le dialogue avec la Samaritaine (Jn 4) ; Présence et/ou Absence de Dieu (Jn 14-17) ; Connaître et aimer (1 Jn) ; Mal, maladie, prière et guérison en saint Jean etc…

De 2006-2007 jusqu'en 2015-2016 il a animé chaque année un séminaire de cinq rencontres au Forum 104 à Paris : La Résurrection, Les gnostiques chrétiens du IIe siècle, Ciel/Terre, Plus on est deux- Plus on est un, Être disciple selon saint Jean, L'énergie en saint Jean, Le témoignage en saint Jean. En 2013-2014 ce sera "Le temps saisi selon la nouveauté christique en saint Jean".

Il est allé régulièrement à Guervœur,un haut lieu de rencontre (cf Les sessions de Jean-Marie Martin à Guervœur de 2000 à 2015).

Il a animé aussi des groupes qui se réunissent chez des particuliers : un groupe poétique (pendant plusieurs années), un groupe de lecture de Heidegger à Paris (de 1993 à 2005 à raison de 18 séances de 2 h chaque année), le groupe mensuel de lecture de saint Paul (qui a débuté en 2006), et d'autres groupes.

Une fois par an il anime un week-end à deux voix avec Maurice Bellet prêtre et psychanalyste, à Saint-Jacut, jusqu'en 2014. Maurice Bellet est décédé le 5 avril 2018 (cf. Hommage à Maurice BELLET prêtre, théologien, psychanalyste, parti sur l'autre rive à 94 ans).

 

 

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