Une parole parabolique (cours sur les paraboles professé à partir des paroles énigmatiques de Mc 4, 10-13 et 21-25 )
On croit souvent que Jésus utilise des paraboles pour se mettre à la portée des simples. Mais quand on l'interroge sur les paraboles il dit bien autre chose, et plusieurs phrases sont quasiment inaudibles : « pour ceux en dehors, tout advient en paraboles, pour que, observant, ils ne voient pas, écoutant, ils ne comprennent pas…“. » Et aussi : « À celui qui a, il lui sera donné. Et celui qui n'a pas, même ce qu'il a lui sera enlevé ! »
Dans un cours qu'il a donné à l'Institut Catholique de Paris en 1978-79, après avoir écarté les idées reçues, Jean-Marie Martin a proposé un chemin pour approcher ces paroles, et cela reste toujours d'actualité : qui sont ceux du dedans et du dehors, qu'est-ce qui est authentiquement Parole de Jésus… ? Voici ce cours qui se situait en milieu d'année. Des notes ont été ajoutées indépendamment de J-M Martin.
Voir aussi le message suivant : Mt 25, 14-30 : La parabole des talents et aussi Homélie sur Mt 13, 1-9 : le semeur sème la Parole.
Une parole parabolique
Dans le chapitre 4 de Marc, après la parabole du semeur on trouve un discours de Jésus sur les paraboles :
« 10Et lorsqu'ils furent seuls, ceux qui étaient autour de lui avec les Douze l'interrogeaient sur les paraboles, 11et il leur disait : “À vous a été donné le mystère du royaume de Dieu, mais pour ceux en dehors, toutes choses adviennent en paraboles, 12afin que, observant, ils observent et ne voient pas, écoutant, ils écoutent et il n'intelligent pas, de peur qu'ils ne se convertissent et qu'il leur soit pardonné”. 13Et il leur disait : “Ne comprenez-vous pas cette parabole? Alors comment connaîtrez-vous toutes les paraboles ?” »[1]
Ensuite commence ce qu'on appelle l'explication : le semeur sème la parole…[2] À cela il faut ajouter les versets 21-25 où Marc introduit des paroles du Christ qui se réfèrent à la question du caché et du manifesté, et qui se réfèrent donc à ce qui est en question dans la parole parabolique :
« 21Il leur disait : “La lampe vient-elle pour être placée sous le boisseau ou sous le lit ? N'est-ce pas pour être placée sur le lampadaire ? 22Car rien de caché qui ne doive être manifesté, rien n'arrive de secret que pour venir se manifester. 23Si quelqu'un a oreilles pour entendre, qu'il entende” ! 24Et il leur disait : “Prenez garde à ce que vous entendez ! De la mesure dont vous mesurez, il sera pour vous mesuré, et il vous sera ajouté. 25Car celui qui a, il lui sera donné. Et celui qui n'a pas, même ce qu'il a lui sera enlevé ” ! »
1) Les idées communes à propos de la parabole.
À propos de la notion de parabole, j'indique deux lectures insuffisantes : d'abord l'idée vulgaire de parabole, qui en fait essentiellement une mise à la portée à l'usage des simples. C'est ainsi par exemple que l'on oppose souvent d'une part le langage de Jésus qui se sert des choses usuelles et bien connues, et d'autre part les absconses spéculations théologiques. C'est ainsi également que l'on accentue le Jésus simple des évangiles synoptiques et le Jésus théologien de Jean. Nous avons travaillé à rendre insignifiante cette opposition-là.
Il n'est pas sans doute inintéressant de voir que ce type de parole se réfère à un genre littéraire attesté par ailleurs et qu'on nomme le mashal, un mot qui indique ce que nous appelons aujourd'hui parabole, mais aussi l'énigme, éventuellement un jeu de mots, une forme littéraire à quoi se référerait ce type de discours. Les théologiens distinguent soigneusement le mashal, parabole de type sémitique, d'avec la lecture allégorique qui est, elle, un trait de la lecture hellénistique, attesté par exemple dans le stoïcisme, et qui aura grand succès dans la première patristique. La différence retenue en général réside en ceci : l'ensemble de la visée de l'histoire parabolique est à mettre en rapport avec ce qu'elle veut dire, alors que les allégories essaient de percevoir des rapports pièce à pièce entre les éléments du signifiant et les éléments du signifié.
Tout, dans les tentatives de lecture de ce genre, n'est pas absolument faux, bien sûr ! Je prends occasion là d'une question qu'on m'a posée tout à l'heure à propos de la parabole du semeur : qui est le semeur ? Un exégète classique serait tout à fait à l'aise pour répondre : ce n'est pas la question, tout l'intérêt de la parabole porte sur la façon dont la Parole de Dieu comme semence est reçue : cette parole tombe, elle tombe de la part du semeur, mais il n'est pas question du semeur, il n'a pas sens ici. Alors qu'en lecture allégorique, il faudrait trouver une signification pièce à pièce, c'est-à-dire qu'au semeur correspondrait quelqu'un.
2) Une lecture valentinienne de la parabole du semeur.
Je vais vous donner un exemple amusant de lecture allégorique, qui, dans le cas présent, s'en va jusqu'à l'hétérodoxie ; c'est la lecture que les Valentiniens font de cette parabole. Les Valentiniens sont des gnostiques du second siècle. Ils sont d'abord dans la grande Église, mais ensuite ils sont mis dehors, et on connaît leurs écrits par les pères de l'Église qui les ont réfutés. Ils lisent attentivement les textes selon un certain mode de lecture qui est le leur. Ces gnostiques se posent la question qui m'a été posée et y répondent de la façon suivante qui va très bien dans le sens de leur doctrine.
En effet, un des éléments de leur doctrine, du moins vue de l'extérieur, et tels qu'ils sont réfutés par les pères de l'Église, consiste en ce qu'il faut distinguer le Père de notre Seigneur Jésus-Christ et le Démiurge ou créateur qui est un Dieu inférieur[3].
Le semeur, c'est le Dieu qui disperse la parole, et ce Dieu-là, disent-ils, est un bien mauvais semeur, c'est un semeur qui ne prend pas soin de sa semence : il en laisse tomber sur le chemin, il en laisse tomber sur la pierraille, il en laisse tomber parmi les ronces etc. c'est donc bien le Dieu démiurge qui disperse dans ce monde au hasard les semences divines.
Ce qui est intéressant ici, c'est que vous avez à la fois une méthode de type allégorique qui se trouve, dans le cas présent, utilisée en fonction d'une doctrine préétablie sur la divinité.
J'ai mentionné ici cette différence retenue par les exégètes entre la parabole et l'allégorie. Cependant je voudrais dire qu'il faut se garder de l'accentuer, parce qu'en fait, si on accentue la différence – disons la similitude – entre la parabole de type juif et l'allégorie de type hellénistique, on oublie totalement une distance plus importante qui est la distance entre ce qu'il y a de commun à cela et nous.
Et c'est cela qui nous préoccupe beaucoup, qui consiste à voir la différence fondamentale de notre présupposé de pensée et de parole par rapport à ce qu'il y a de commun à l'époque de la naissance du christianisme, dans ce monde judéo-hellénistique qui est le lieu de naissance de notre Nouveau Testament.
3) Qu'est-ce qui est Parole de Dieu ?
Je tiens à préciser les présupposés de notre lecture de l'Écriture avant d'aborder la question de ce qui est dit par Jésus : la parabole est faite pour qu'on ne comprenne pas.
Certains exégètes font une différence entre d'une part l'enseignement de Jésus tel qu'on peut le conjecturer, enseignement qui serait de toute façon prééminent, et d'autre part des conceptions interprétatives, des théologies diverses qui appartiendraient à la façon dont sont rappelées les ipsissima verba, les paroles mêmes de Jésus : la conception de Matthieu serait plus proche de la conception de Jésus, et la conception de Marc subirait une autre influence, relèverait d'une autre préoccupation.
Nous avons constamment refusé ici ce genre de problématiques, parce que la parole qui est Parole de Dieu pour moi, pour nous, n'est pas la parole conjecturée historique de Jésus, plutôt que la parole relatée dans Marc ou dans Matthieu ou dans Jean. Je dirais même que la parole prononcée par Jésus n'a, du point de vue de la foi, aucune existence. Elle est, de toute façon, dans une autre parole. L'autre parole, c'est ou la parole de Marc, de Jean etc., ou la parole d'un historien qui conjecture. Or ce qui est Parole de Dieu pour l'Église n'est pas la parole de l'historien conjecturant. Elle est la Parole de Jésus dite par Matthieu, Marc et Jean. Et cela a une importance capitale parce que ce qui fonde ma foi, ce n'est pas une parole que Jésus aurait dite, ni même que Jésus a dite, mais c'est la parole que Jésus dit !
Autrement dit, la question est : Qui parle dans l'Évangile ? Le Ressuscité. Où est la parole du Ressuscité ? Dans la bouche apostolique. La parole scripturaire est le corps du Ressuscité, c'est-à-dire la présence du Ressuscité à moi, à nous, à l'Église, et en tant qu'entendue, elle est l'Église.
Nous revenons ici à cette vieille problématique que nous avons rencontrée à plusieurs reprises, étant bien entendu que le texte évangélique peut être questionné par quiconque à partir d'où il veut, y compris à partir de l'histoire, cela est possible. Je dis même que, dans l'état de notre propre constitution mentale, cela est inévitable et nécessaire, relativement nécessaire. Ce que je dis, c'est que ce n'est pas la lecture authentique de l'écriture, ou en tout cas pas la lecture suffisante de l'écriture.
Notre question de départ était de savoir si l'Écriture était un document d'histoire essentiellement, ou bien la parole chiffrée de ma vie. Ces principes généraux sont à nouveau mis au clair, et là je ne fais qu'essayer de préciser les présupposés qui ont conduit notre lecture, qu'essayer de les mettre à jour, de les reconnaître.
4) Attitudes devant la parole apparemment inaudible.
Vous avez remarqué par ailleurs que se fait jour ici, dans le texte, une notion apparemment négative de la parabole : la parabole est faite pour qu'on ne comprenne pas. Cela pose la question de : comment concrètement se tenir devant un discours comme celui relaté par Marc : « Pour ceux du dehors, tout arrive en paraboles… pour qu'ils ne comprennent pas » ? Devant un texte de ce genre, il y a deux attitudes irrecevables, et une bonne attitude :
● la première attitude irrecevable c'est de refuser pas un biais quelconque cette parole inaudible. Et il existe des modes sournois de refuser, dont ce que nous venons de lire est un exemple. C'est le recours à la culture de l'époque : faire un tri, dans la parole évangélique, entre d'une part ce qui est authentique, c'est-à-dire ce qui fait partie des ipsissima verba (en général c'est ce qui nous convient le mieux), et d'autre part, ce qui relève de la culture de l'époque, cela étant expliqué par exemple par la méthode du judaïsme tardif, mais ne pouvant en aucune façon être de Jésus. Je simplifie un peu, car ce n'est pas précisément ce point que je critique, c'est le principe qui porte le ciseau dans le tissu du texte, dans la texture de l'Écriture, en en faisant deux parts. Cela tue la Parole.
● la deuxième attitude, également irrecevable, c'est de dire : « Ah bon, je ne le croyais pas, mais donc Dieu désire l'endurcissement »… et être content avec cela. C'est une attitude qui n'est pas fidèle au cœur, car on sait bien que c'est dans notre cœur qu'il faut porter le ciseau. C'est même essentiellement cela la krisis, la déchirure fondamentale. Mais il faut le faire à bon escient. Ce que j'appelle ici notre cœur, c'est à la fois les présupposés hérités nativement que nous appelons des évidences, mais c'est aussi peut-être l'Esprit de Dieu présent en nous. C'est pour cela qu'il ne faut pas se rendre trop vite non plus.
Alors quelle est la bonne façon ? La bonne façon c'est de tenir la question comme question, de ne pas céder sur le cœur tant qu'il paraît bon, de ne pas trouver des subterfuges pour plier le texte à notre cœur. Tenir la question.
5) Éléments sous-jacents.
Dans le cas présent, il y a un rapport étroit entre le mustêrion et la parabole, tel que la parabole joue à la fois le rôle de voile et le rôle de dévoilant. Nous avons une idée extrêmement simpliste des rapports du caché et du manifesté, parce que nous pensons en alternance et en opposition, alors que ce qui manifeste vraiment le caché le voile en même temps parce qu'il le manifeste encore comme caché. Et il n'y a pas une conception et une conception, il y a deux aspects fondamentaux de cette réalité qui est la Révélation[4].
Vous me direz : oui, mais ici ce n'est pas cela qui fait difficulté, c'est la différence entre ceux du dedans et ceux du dehors, et aussi que c'est fait pour enténébrer (« Pour ceux du dehors, tout arrive en paraboles… pour qu'ils ne voient pas… qu'ils ne comprennent pas »). Ces deux difficultés sont assez faciles à dissoudre parce qu'elles ne sont pas au cœur de la question.
1/ Il faut bien voir que le dedans et le dehors ne sont pas "les uns" et "les autres", mais c'est toujours au cœur de nous qu'il y a le dedans et le dehors. C'est très important, et en rapport avec notre façon habituelle de lire l'écriture ici.
Le débat violent avec l'extérieur qui a pour type le débat avec les pharisiens n'est pas une anecdote passée. J'entends l'Évangile à la mesure où ce débat est débat du Christ et du pharisien en moi : le débat est dans l'auditeur. Cela d'une certaine façon conforte largement la façon dont nous avons voulu approcher l'Écriture.
2/ Par ailleurs, dans la question du "pour" enténébrer : « Pour ceux du dehors, je parle en paraboles pour que, regardant, ils ne voient pas, pour qu'entendant ils ne comprennent pas…», il faut savoir que les conjonctions notamment causales, finales etc. dans le Nouveau Testament, ne correspondent pas à notre grammaire occidentale, et très souvent le "pour" final devrait se traduire plutôt de façon consécutive : « de telle sorte que », ou « ce qui est que »[5]. Nous avons en particulier fait une réflexion de ce genre à propos de saint Jean où c'est très clair[6] . L'étude des conjonctions de subordination chez Jean est très importante. On retrouve quelque chose de semblable à propos des rapports entre sauver et juger : « le Fils de l'homme n'est pas venu pour juger, mais pour que par lui le monde soit sauf ; et celui qui n'entend pas est déjà jugé »[7], il est jugé du fait de ne pas entendre. Il y a là cette krisis qui est la condition même de l'avènement[8], en ce que, pour que du neuf advienne, il se fait que de l'ancien s'en va. C'est dans le même mouvement.
Nous avons marqué un certain nombre de points de réflexion sur la façon de se tenir concrètement devant un texte apparemment scandaleux que celui-ci, et sans avoir hâtivement cherché des subterfuges en tripotant le texte. Je ne dis pas que nous sommes tout à fait encore au point d'entendre ce texte, mais se tenir devant cette question est ce qu'il faut faire.
Ceci d'autant plus qu'ici, Jésus fait explicitement œuvre de didascale (d'enseignant). Et qui est le didascale de la parole évangélique, sinon Jésus le vivant ? Jésus ressuscité est notre didascale. Marc disant la parole, dit la parole de Jésus ressuscité. Et cette première didascalie est une référence essentielle pour tout le temps de l'Église, puisque l'Église tient cette Écriture dans sa main comme sa référence.
6) La structure caché / manifesté.
Ici Jésus fait donc explicitement œuvre de didascale (d'enseignant). Mais la recherche de Jésus didascale ne s'arrête pas là ! Elle continue dans la recherche d'intelligence, dans le don d'intelligence de ces textes que nous ne cessons d'approcher, de chercher à approcher. Je fais allusion ici à la symbolique du caché et du manifesté.
On la voit apparaître à la fin de l'explication que Jésus donne de la première parabole :
- « Il leur dit encore : “Apporte-t-on la lampe pour la mettre sous le boisseau, ou sous le lit ? N'est-ce pas pour la mettre sur le chandelier ? En effet, rien n'est caché (krupton) que pour être manifesté (phanérôtê), rien de secret (apokrupton) n'advient que pour venir à manifestation (phanéron)”. » (Mc 4, 21-22)
La structure caché/manifesté n'est pas structurante chez nous, et d'autres structures se sont substituées. Nous avons notamment chez nous la structure du prévu et du réalisé, du plan de Dieu et de l'effectivité de choses, c'est-à-dire finalement la structure du programmateur et de l'accomplissement du programme : nous retrouvons toujours ces choses qui courent dans l'idée de Dieu créateur.
Mais dans le texte évangélique, nous avons la structure du caché au manifesté, ce qui met en question les rapports de temps. Et c'est cela qui est repris au verset 22, on trouve la question du krupton (caché) et du phanéron (manifesté), et nous savons par ailleurs que cela a une signification par rapport à la symbolique végétale, à la mesure où la graine est l'arbre en caché, et l'arbre est le même que la graine dans le manifeste, dans le manifesté[9].
À la façon dont nous marchons ici, il apparaît peu à peu que nous ne considérons pas, sous le terme de "parabole", simplement un genre littéraire particulier qui occupe quelques pages de l'Évangile, mais nous considérons en un certain sens que toute l'Écriture et toute parole sur Dieu, sont, en ce sens-là, essentiellement paraboliques. Je ne dis pas que toute page est de la structure particulière du genre parabole ; je dis, au sens où j'ai essayé de penser ce qu'il en est profondément de la parabole, que toute parole sur Dieu est essentiellement parabolique.
Le paradoxe du verset 25.
Et au verset 25, on trouve ce paradoxe qui est dans la ligne des provocations que nous venons de lire car « à celui qui a, on lui donnera, et à celui qui n'a pas, même ce qu'il a lui sera retiré ». Ekheïn (avoir) c'est ici détenir, et c'est manquer. Ne pas détenir c'est recevoir. Ce qui est en question ici, c'est fondamentalement la vie même du Christ, le sens de sa mort et de sa résurrection telle que nous le lisions en Ph 2[10].
Et cela nous conduit à notre dernière réflexion qui est la chose de cette année : se refuser à distinguer d'une part un événement, et d'autre part un discours ; d'une part un récit sur la mort du Christ et d'autre part l'énoncé des enseignements du Christ, c'est-à-dire finalement, d'une part une christologie sur le Christ et d'autre part la doctrine du Christ. Il n'y a pas d'autre christologie que d'entendre ce que le Christ dit et ce qu'il est du fait de le dire. C'est normal puisqu'il est la Parole, et la parole non pas seulement dans un sens dissertant de quelqu'un qui dit des paroles et qui enseigne. Il est la Parole, la Parole efficace, la même lorsque je récite son geste et lorsque je recueille sa Parole.
[1] On a le même genre de chose chez Matthieu qui donne l'origine de la sentence, elle vient d'Isaïe 6,9-10 : « Les disciples s'approchant lui dirent: "Pourquoi leur parles-tu en paraboles?" Il répondit: "C'est qu'à vous il a été donné de connaître les mystères du Royaume des Cieux, mais cela n'a pas été donné à ces gens-là. Car à celui qui a on donnera, on donnera même du surplus, mais à celui qui n'a pas on enlèvera même ce qu'il a. C'est pour ça que je leur parle en paraboles, parce que regardant ils ne voient pas et écoutant ils n'entendent ni ne comprennent. Ainsi s'accomplit pour eux la prophétie d'Isaïe: Vous aurez beau entendre vous ne comprendrez pas. Vous aurez beau regarder, vous ne verrez pas... » (Mt 13, 10-15)
[2] On pourra à ce sujet voir : Homélie sur Mt 13, 1-9 : le semeur sème la Parole.
[3] Cf. le complément "La distinction démiurge – Dieu de NSJC dans la 1ère pensée chrétienne" à la fin de Dieu est "créateur du ciel et de la terre", Comment bien entendre ce titre ?.
[4] Cf. Le dévoilement garde référence au caché, et donc cache ce qui est dévoilé, dans Jn 12, 20-26 : « Nous voulons voir Jésus », La mort féconde du grain de blé. le b) du II sur Jn 12, 24.
[5] Dans le texte d'Is 6,9-10 il n'y a pas de finalité. En effet ce texte fait suite à la grande vision dans le Temple qui inaugure la mission du prophète. Isaïe s'entend dire par Dieu : « Va, dis à ce peuple : ‹ Entendez, entendez, mais vous ne comprendrez pas. Voyez, voyez, mais vous ne connaîtrez pas. Rends insensible le cœur de ce peuple, alourdis ses oreilles, bouche ses yeux, qu’il ne voie de ses yeux, n’entende de ses oreilles, que son cœur ne discerne, qu’il ne retourne et sois guéri. ».
[6] Cf. Syntaxe hébraïque : y a-t-il de la causalité en notre sens ? Conséquences pour la lecture du NT.
[7] Cf. Jn 3, 12-18. Jugement et salut La symbolique de la croix chez Jean .
[8] Ceci est tellement important que la citation d'Isaïe se retrouve à de nombreux endroits du Nouveau Testament avec des variations : en Mc 4, 12; Lc 8, 10 ; Jn 12, 40 ; Ac 28, 26-27 ; Rm 11, 8..Il y a une phrase de Jésus du même genre dans le chapitre de l'aveugle-né :« Je suis venu vers ce monde pour un jugement, que les non-voyants deviennent voyants, et que les voyants deviennent aveugles » (Jn 9, 39). Voir ce qu'en dit J-M Martin dans Jn 9, 1-41 : Guérison de l'aveugle-né suivie d'une enquête à son sujet. On trouve des réflexions qui vont un peu dans le même sens chez Camille Focant : « Lorsqu'il parle en paraboles, Jésus offre une voie de vérité, mais paradoxale car le Royaume ne peut être appréhendé positivement que comme mystère… Cela revient à dire que le don du mystère ne consiste pas en un savoir tout fait ; il crée plutôt les conditions d'aptitude à être serviteurs de la parole…. Les proches savent qu'il existe un mystère et donc une clé des paraboles-énigmes, mais ils n'en connaissent pas le contenu. Cette situation fait d'eux des questionneurs… » (Dans Marc, un évangile étonnant: recueil d'essais).